Titre : Aquarium
Auteur : David Vann
Genre : Roman psychologique, drame
Editeur : Gallmeister
Traduction : Laura Derajinski
Année d’édition : 2016
Nombre de pages : 280
Résumé : Caitlin, douze ans, habite avec sa mère dans un modeste appartement d’une banlieue de Seattle. Afin d’échapper à la solitude et à la grisaille de sa vie quotidienne, chaque jour, après l’école, elle court à l’aquarium pour se plonger dans les profondeurs du monde marin qui la fascine. Là, elle rencontre un vieil homme qui semble partager sa passion pour les poissons et devient peu à peu son confident. Mais la vie de Caitlin bascule le jour où sa mère découvre cette amitié et lui révèle le terrible secret qui les lie toutes deux à cet homme.
Commentaire : Voici un livre dont je n’avais jamais entendu parler et que je n’aurais donc probablement jamais lu s’il n’avait pas été proposé dans le cadre de notre challenge lecture avec Milady. Et franchement, je serais passée à côté d’une petite perle. J’ai adoré cette lecture… même si elle a été très éprouvante psychologiquement par moment.
Rien qu’avec le résumé, je me suis doutée que ce ne serait pas l’histoire tranquille d’une amitié attendrissante entre une adolescente un peu esseulée et un vieil homme. Je m’attendais à un petit caillou dans la chaussure qui fait mal… mais pas un de cette taille.
Le roman commence tout doucement, avec les heures passés à l’aquarium de Caitlin qui nous décrit les poissons dans leurs moindres détails. Et le talent de David Vann pour la description ne passe pas inaperçu : on s’y croirait. Sa description des méduses, de leurs mouvements, de leurs couleurs, leurs textures… C’est absolument fascinant.
Il est rare qu’une description m’emporte autant.
Le début n’est donc pas bien prenant, peut-être même un peu lent. Je n’irais pas jusqu’à dire qu’on s’ennuie comme Caitlin, car c’est si bien écrit qu’on y trouve un plaisir à la lecture, mais tout est plutôt lent.
Et puis avec l’arrivée du vieil homme et de son amitié avec l’adolescente qui ne plaît pas du tout à sa mère, tout bascule.
La tournure des choses est complètement inattendue et sombre dans la pire des noirceurs. On suffoque presque à la lecture.
Puis revient une éclaircie. On respire, mais la boule au ventre, car on se demande si tout ne va pas éclater à nouveau. Et ça éclate encore… jusqu’au dénouement.
Les relations familiales sont extrêmement bien dépeintes dans ce livre, et la limite très fine entre amour et haine, protection et toxicité, peur et attachement, folie et méchanceté sont dépeints avec une finesse remarquable. On ne déteste jamais tout à fait les personnages, même quand ils se permettent des horreurs.
C’est un très bon livre. On en ressort un peu sonné, pas forcément joyeux, mais un peu différent.
J’ai enlevé une étoile car l’auteur a choisi d’écrire les dialogues sans tiret ni guillemet ce qui a rendu le début de la lecture très laborieuse. Je recommençais tout le temps, ne sachant plus qui parlait ou si c’était une description. J’ai fini par m’y habituer et ne plus y faire attention – ce qui au passage est un tour de force ! -, mais ça a clairement gêné ma lecture au début.
Aussi j’ai trouvé Caitlin parfois trop adulte dans son savoir et dans ses réflexions pour une enfant de 12 ans. Cela peut s’expliquer parce qu’on se rend compte au bout de quelques temps que le narrateur est en fait Caitlin adulte qui revient sur cette période de sa vie, mais ce contraste entre son côté très enfantin parfois, puis très (trop ?) adulte ensuite ne m’a pas toujours convaincue.
Mais franchement, là je pinaille.
Bref, en seulement quelques mots pour résumer, c’est un très bon roman, et je vous le recommande !
Extraits :
Le vieil homme me posa la main sur l’épaule. Tout va bien, dit-il. Tu es en sécurité.
Je me souviens de ses paroles. Il m’avait dit que j’étais en sécurité. Il avait toujours les mots qu’il fallait. Je l’étreignis alors, mes bras enroulés autour de son cou. J’avais besoin de m’accrocher à quelqu’un. Ses cheveux secs comme de l’herbe, les os de ses épaules, rien de doux, une armure pareille à celle d’un hippocampe, et laid aussi, mais je m’accrochai à lui comme à ma propre branche de corail.
Tout est possible avec un parent. Les parents sont des dieux. Ils nous font et nous détruisent. Ils déforment le monde, le recréent à leur manière et c’est ce monde-là qu’on connaît ensuite, pour toujours. C’est le seul monde. On est incapable de voir à quoi d’autre il pourrait ressembler.
Ce qui est triste c’est que je me souviens que ce livre m’a appris des choses sur les poissons… et j’ai tout oublié 🙁
En revanche, il y a des choses dedans (que je ne spoile à personne) que je ne risque pas d’oublier de sitôt, pour le coup… Il était dur ce livre ! Comme tu dis, ce n’était pas un petit caillou dans la chaussure, mais un foutu rocher dont on se demande comment il a pu entrer dans la chaussure.
+1000 points pour avoir évoqué les méduses♥
En tous cas, je suis contente de l’avoir lu aussi 🙂 Je l’avais choisi uniquement à cause de sa jolie couverture, et c’était une bonne (bien qu’éprouvante) pioche 🙂
Le passage des méduses m’avait vraiment laissée pantoise, impossible de ne pas le mentionner ! Après je suis un public tout acquis puisque je suis fascinée par les méduses. Mais vraiment, c’est rare qu’une description me fascine (voire m’apaise comme un véritable aquarium !) à ce point.
Idem, j’ai un souci de parfois complètement oublier un livre pas si longtemps après l’avoir lu, mais celui-là, les scènes sont marquées dans mon esprit au fer je crois, ha ha.
Merci encore de me l’avoir fait découvrir (je l’avais moi-même choisi dans ta liste pour la couverture ! Bien joué à la maison d’édition pour cette illustration !).